par Roufaou Oumarou, Ministre au Shadow Cabinet en charge de Science, Technologie et Développement pour SDFCameroon.org
Le livre de Ward Churchill «“To Disrupt, Discredit and Destroy” The FBI’s Secret War against the Black Panther Party », qui décrit les techniques utilisées par le FBI pour détruire le Black Panthers Party aux Etats-Unis, est une de ces lectures à recommender à tous ceux qui veulent étudier les techniques de guerre psychologique utilisée par des regimes pour détruire un mouvement politique tout en préservant l'illusion de l'existance d'un contexte démocratique gouverné par un semblant d'Etat de Droit.
L’expression « Perturber, discréditer et détruire» s'explique toute seule: infiltrer la cible à tous les niveaux par des agents provocateurs pour perturber son fonctionnement interne et le diviser, bombarder continuellement l’opinion publique avec un torrent de fausses informations et d’accusations fantaisistes sur la cible, le tout diffusé dans les médias aux ordres ou avides de sensationnalisme pour la discréditer auprès du public. Les objectifs poursuivis sont entre autres: semer la zizanie en interne, pertureber le fonctionnement, isoler la cible de tout soutien potentiel, freiner ou empêcher le recrutement de nouveaux membres, détruire la réputation, faire croire aux opprimés que ceux qui luttent pour sa libération sont pires que ses oppresseurs actuels, semer le doute sur les compétences et l'intégrité des leaders de l'organisation.
Cette technique est en fait universelle et elle a été largement utilisée contre les mouvements de luttes de libérations partout dans le monde, notamment contre l’UPC au Cameroun dans les années 50, 60 et 70 et contre le SDF après 1990.
Le Social Democratic Front (SDF) a fêté ses 32 ans d’existences cette année, et malgré les obstacles et difficultés, malgré la guerre au NOSO, force est de constater qu’il est toujours debout. Le bateau a maintes fois tangué en traversant d’innombrables tempêtes internes et externes, mais loin de couler il est devenu toujours plus résistant aux vents contraires. Les plus fortes de ces tempêtes étaient celles qui se présentaient sous formes d’accusations diffamatoires contre le Chairman John Fru Ndi, passant surtout soit par des rélais internes soit par des ex-membres exclus ou partis d'eux-même après avoir constaté que le chemin vers le pouvoir est plus long qu'ils ne pensaient.
Le temps est un autre nom de Dieu, dit-on. Il permet de relativiser les choses, de les placer dans leur vrai contexte et il révèle les agendas cachés des uns et des autres. Il suffit de se boucher le nez et d’aller visiter, dans la poubelle de l’Histoire des luttes récentes du Peuple Camerounais pour le Changement, le destin de certains de ceux qui, fin des années 90 et début des années 2000, accusaient de corruption le SDF et son Chairman.
Vous êtes donc invités ici à (re-)visiter quelques uns des principales accusations mensongères qui n’ont pas tueR le SDF.
N° 1 : Fru Ndi a pris 500 millions de fcfa pour saboter la candidature unique de l’opposition en 2004
Autre variante : « John Fru Ndi a vendu la lutte du peuple camerounais ».
« Un commissaire accuse Ni John Fru Ndi d’avoir perçu la somme de 500 millions de FCFA lors de la présidentielle de 2004 » titrait en 2006 un journal de la place. L’accusateur ? Un ex-commissaire de la police camerounaise, lui-même accusé de malversations et diverses fautes professionnelles et radié de la Police Il avait fui le pays et s’était exilé en France, et c’était donc de son exile qu’il parlait à des médias, affirmant que « John Fru Ndi a reçu de l’argent pour casser la candidature unique de l’opposition que devait incarner Adamou Ndam Njoya… Je vous dis… C’était une mallette de 500 millions, c’est Edgard Alain Mebe Ngo’o qui la transportait… ».
Toute la galaxie politico-médiatique proche du régime Biya s’était emparée de l’accusation, qui est multipliée, amplifiée et diffusée sous forme de kongossa partout dans le pays, dans les bars et les meetings politiques. Les adversaires internes du Chairman ne s’étaient pas non plus privés, comme hélas cela arrive souvent, de s’emparer de l’accusation infamante pour servie leur agenda, ne comprenant pas qu’en agissant ainsi ils servaient l’objectifs du régime Biya de paralyser en perturbant son fonctionnement interne et même de le diviser le SDF pour affaiblir ultimativement le seul grand parti d’opposition à l’époque qui pouvait mettre en danger le régime.
L’accusation de recevoir «des fonds occultes considérables » du gouvernement va revenir très régulièrement contre le SDF à chaque situation de crise interne du parti ou lorsque le régime RDPC est en situation particulière de difficultés politiques, peu importe que le SDF en soit pour quelque chose ou pas.
Une chose qui ne change pas: le désintérêt des uns et des autres à une approche rationnelle, à demander des preuves avant de croire. Au Cameroun on croit bien sûr qu’il est possible de mettre facilement 500 millions de francs cfa cash dans une mallette aisément transportable dans les rues de Yaoundé jusqu’à un hôtel, et que John Fru Ndi avait probablement transporté l’argent caché dans sa gangoura.
Ni l’accusateur dont la crédibilité est pourtant en dessous de zéro, ni les très nombreux médias publiques et privés, ni les concurrents et ennemis du SDF qui ont repris et diffusé l’infamante accusation, ni aucune enquête médiatique ou judiciaire, n’ont fourni la moindre preuve de l'accusation jusqu’aujourd’hui. Mais comme on le sait, « mentez, mentez, il en reste toujours quelque chose ». Pour noyer son chien, on l'accuse de rage. Simple.
Le grand bénéficiaire de cette monstrueuse diffamation du Chairman est bien entendu le régime Biya. Aujourd’hui le fameux commissaire Albert Léopold Ebéné se débrouille toujours en exile et Edgar Alain Mebe Ngo’o est en prison à Kondengui.
N° 2 : le SDF est le parti des “Bamenda”
Autre variante de cette accusation : « le SDF est un parti anglo-bami ». C’est un parti des « anglophones », et plus particulièrement des « bamendas » qui l’ont pris en otage avec la complicité de John Fru Ndi. Il y aurait une discrimination systématique des « francophones » dans le parti, notamment dans l’attribution des postes et dans l’influence politique.
Le but de cette diffamation est clair : enfoncer le SDF dans le tiroir de l’origine ethno-régionale de son leader charismatique, en faisant croire aux Camerounais non ressortissants du Nord-Ouest qu’ils n’y sont pas les bienvenus et qu’adhérer au SDF serait une trahison de l’intérêt de leurs communautés et/ou région d’origine. C’est juste une variante de la technique de l’instrumentalisation du tribalisme contre les adversaires politiques du régime RDPC.
Le SDF a été créé le 26 Mai 1990 à Bamenda, capitale de la région du Nord-Ouest à l’issue de manifestations réprimées dans le sang par le régime Biya. Au moins six personnes furent assassinées pendant les repressions, et aujourd’hui une plaque commémorative rappelle leur sacrifice. Créé donc dans une zone dite anglophone dans un contexte de manifestations de masse et de frustrations contre le centralisme jacobiniste du régime de Yaoundé, c’est tout naturellement que son leadership comprenne une proportion importante de Camerounais dits d’expressions anglophones et que l’héritage politique anglo-saxone ait une certaine influence. Cependant dès le départ les Camerounais de toutes origines, et notamment ceux des originaires du Littoral et de l’Ouest, faisaient partie de la direction du parti et on impacté son programme et son fonctionnement.
Le SDF a des structures dans toutes les 10 régions du Cameroun et John Fru Ndi avait soulevé des foules partout où il était passé, de Akwaya à Yokadouma et de Douala à Kousséri.
N° 3: le SDF négocie avec Biya pour entrer au gouvernement
C’est littéralement le serpent de mer de la politique camerounaise depuis 30 ans.
En effet depuis 1992 tout le monde en a entendu parler, tout le monde est convaincu de sa réalité et tout le monde en parle, chacun y va de son analyse et de ses sorties parfois émotionnelles, à l’intérieur comme à l’extérieur du parti. En août 2007 Le Messager, journal supposé être sérieux, écrivait même à sa "Une que « le Front social démocrate (Sdf, en anglais) acceptait la main tendue de Paul Biya, pour la formation d'un gouvernement intégrant toutes les forces politiques au Cameroun». Lorsque le nouveau gouvernement Biya est formé sans le SDF, le Journal baragouinera des explications fantaisistes pour se dédouaner.
Curieusement, tandis que l’opinion ne semble plus s’exciter de cette nouvelle, l’accusation de mener des « négociations pour entrer au gouvernement » de Biya est aujourd’hui encore l’une des meilleures armes utilisées en interne contre le Chairman et récemment contre le 1èr Vice-Président Joshua Osih.
Comme toute arme de diffamation, cette accusation n’a pas besoin d’être appuyée par des preuves solides pour faire son effet. Pas de rencontres publiques ou privées sur le sujet entre des envoyés du RDPC ou de Biya et le SDF, pas de groupes de travails communs, pas de communiqués ni d’autres documents écrits, pas de projets communs dans ce sens ni à l’Assemblée Nationale, ou Sénat ou à un autre niveau, etc. Mentez, mentez, il en restera toujours quelque chose…
Soit ils sont les pires négociateurs du monde, soit ils sont très forts (selon les points de vue), ces négociateurs du SDF et du RDPC qui discutent depuis 30 ans d’un projet tel que celui-là sans se faire prendre la main dans le sac et sans aboutir, soit la rumeur est tout simplement ce qu’elle est : une distraction de plus utilisée pour assassiner la réputation de l’adversaire politique et masque d’autres agendas.
Une autre variante de cette accusation : « le SDF est en collusion totale avec le régime Biya ». Ici aussi ne demandez pas de preuve rationnelle, genre projets du RDPC votés au parlement, preuves écrites, etc. Parfois au Cameroun il suffit de pointer le doigt sur un individu au marché et de crier « voleur » pour que le malheureux se fasse lyncher. En politique ce n’est pas très différent.
N° 4 : Le SDF est pris en otage par les transfuges du RDPC
Autres variantes de cette accusation : «John Fru s’est subtitué à toutes les instances du parti » , « le SDF pratique juste une opposition d’alibi ».
Le 29 juillet 2002, plusieurs « hauts cadres » du SDF publient un communiqué dans lequel ils affirment d’une part que le «parti avait fini par être pris en otage par des transfuges du système de parti unique, nostalgiques des pratiques de ce dernier [et] se trouve de fait, en totale collusion avec le régime en place» et d’autres parts que «le chef de l’exécutif , avec l’aide de quelques thuriféraires, s’est substitué à toutes les instances du parti».
Cette accusation qui revient de temps en temps, comme il y a quelques semaines après la nomination d’un nouveau Shadow Cabinet, est essentiellement interne et elle avait eu ses beaux jours pendant les années de crises internes à la fin des années 1990 et début des années 2000. Elle était surtout lancée par des adversaires internes du leadership du parti, qui très souvent étaient eux-mêmes des …transfuges du RDPC. On peut s'étonner que certains croient aujourd'hui s'en servir pour influencer les rapports de forces à l'intérieur du parti.
Il faut se rappeler qu’avant 1990 le Cameroun vivant sous le régime du parti unique et donc il n’y avait qu’un seul parti légalement autorisé : l’UNC qui est devenu RDPC en 1985. Tous ceux qui faisaient de la politique légalement au pays, qu’ils soient des militants sincères ou des opportunistes, étaient membres du Parti-État. Ce n’était donc pas surprenant que, lorsque grâce notamment aux sacrifices du SDF, le multipartisme avait été autorisé, un très grand nombre de personnes ont profité des nouvelles libertés politiques pour créer ou adhérer à d’autres partis.
Partant du constat que le RDPC est un repoussoir absolu pour toute personne soucieuse d’un changement démocratique au Cameroun, quoi de plus normal que de tenter de salir les dirigeants du parti en les associant d’une manière ou d’une autre au Parti-Etat ?
N° 5 : John Fru piétine les statuts du SDF au pied
Vraie ou fausse, en interne c’est l’accusation préférée de tous ceux dont les ambitions ou simple désidératas circonstanciels sont contrariés par le Chairman et, en 32 ans de vie politique du SDF, on constate presqu’avec amusement combien elle est fluctueuse, parfois au niveau des mêmes personnes pas toujours exemplaires dans leurs propres comportements et agissements dans leurs domaines de responsabilités. S'il en est bénéficiaire il applaudit, si ça le prend (pour parler en camerounais) il hurle à la dictature du Chairman.
John Fru Ndi doit être si fort que depuis 1990 qu’on entend cela, à notre connaissance aucun tribunal au Cameroun ni aucun organe interne du parti n’a réussi à le condamner clairement pour violation de statuts du SDF. Il est indiscutable que le Chairman, en tant que Capitaine d’un bateau pris régulièrement dans les tempêtes, a usé de fermeté et d’autoritarisme pour sauvegarder, selon ce qu’il affirme constamment, l’intérêt général.
N° 6 : FRU NDI EXIGE 5 MILLIONS À CHAQUE CANDIDAT DU SDF
Cette accusation est en réalité une autre variante de la sempiternelle accusation de corruption lancée de temps en temps contre le SDF et son Chairman, même si elle est particulièrement grosse.
« Vexé par des soupçons de corruption des délégués lors des primaires, le chairman choisit de prélever une ‘taxe’ aux corrupteurs candidats à la candidature à la députation ». C’était dans le cadre des affrontements aux primaires internes en vue des élections législatives de 2013.
La base de l’accusation publiée par certains médias ? Des participants à une réunion du NEC tenue à Bamenda auraient dit que John Fru Ndi leur aurait fait la confidence suivante « j’ai été suffisamment informé de ce que l’argent a circulé lors des primaires. Cela implique que les pauvres ne peuvent pas être conseillers municipaux ou députés. C’est regrettable. Je vais exiger cinq millions à certains de ces députés pour valider leur candidature ».
L’accusation est bien évidemment totalement fausse, mais lancée en public à la veuille d’un rendez-vous électoral important, elle entre dans le cadre de l’arsenal de la guerre psychologique menée contre le SDF afin de démolir davantage sa réputation et celle de ses dirigeants.
N° 07 : il y a un 'Deal' entre Paul Biya et Fru Ndi contre les Bamilékés
C’est probablement l’une des accusations les plus enfantines lancées contre le SDF tellement le ou les auteurs semblaient confus et faibles argumentativement, mais elle avait quand même trouvé des pages dans les réseaux sociaux et des médias pour la publier ainsi que des amateurs de kongossa’s pour en discuter dans certains bars. C’était en 2018 et en réalité la cible était Joshua Osih.
Considérons cette pépite extraite d’un article publié à ce sujet dans camerounweb.com en 2018 : « Joshua Osih n'est pas Bami. Donc politiquement ne peut être révolutionnaire. Sa posture politique ne pourrait être à "gauche". C'est impossible. C'est un allemand dont le père est de Kumba (sud-ouest) et la mère de Kribi (Sud). Où était Joshua Osih en 1990 quand nous luttâmes pour instaurer l démocratie au Cameroun ? Et pourquoi Paul Biya impose Joshua Osih comme numéro deux au SDF ? » Édifiant, n’est-ce pas ?
Top 08 : John Fri Ndi a planqué des milliards dans un compte bancaire à Londres
Selon un article publié en octobre 2005 par un journaliste appelé Clovis Atatah dans le journal d’expression anglaise The Post, et repris largement au delà des frontières du Cameroun par des médias comme undefined, « un document circulant dans certains cercles à Yaoundé prétend que le président du SDF, John Fru Ndi, possède une fortune en Europe évaluée à 64 milliards de FCFA, y compris des comptes à hauteur de 25 milliards de FCFA. Le document, qui serait basé sur une enquête de la lettre d'information à diffusion restreinte, Africa Confidential, affirme que Fru Ndi a acquis 70 % de cette richesse grâce à des accords secrets entre lui et le Président Paul Biya entre 2002 et 2005.».
Contacté, John Fri Ndi avait démenti l’information qu’il avait qualifiée de « ridicule », mais qu’importe, l’accusation est lancée et comme toujours elle est emportée par le vent dans toutes les directions.
Peu de temps après le média qui a lancé l’accusation publie un démenti : « Africa Confidential réfute l'histoire des "milliards sur le compte de Fru Ndi à Londres". » D’après Mr Patrick Smith, rédacteur en chef d'Africa Confidential, les allégations sont «complètement fausses [..] Africa Confidential n'enquête pas sur M. Fru Ndi et n'a pas diffusé de documents l'accusant de liens de corruption avec le Président Biya».
Mais ici aussi qu’importe e démenti. Les médias qui avaient repris l’accusation ne publient pas le démenti, et ainsi quelque chose reste quand même accroché sur la réputation de la victime. D'après un lecteur, « il ne s'agit pas d'une question de réflexion, mais d'une question d'enquête : il n'y a pas de fumée sans feu. Qui n'aurait pas cru que Clinton n'avait pas eu de relations sexuelles avec Monika Lewinsky ou qu'il y avait une arme de destruction massive dans l'arrière-cour de Saddam Hussein ? Tous ces éléments ont été révélés après des mois d'enquête, laissez Ni John sortir de l'ombre et divulguer tous les accès à ses comptes et coopérer avec une enquête de son propre parti ainsi que du gouvernement.». La charge de la preuve est inversée, c'est à Fru de prouver que l'accusation est fausse. Heureusement, le temps passant, les mensonges meurent malgrés tout, parfois de leurs belles morts.
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