par Jean-Robert Wafo, Ministre du Shadow Cabinet pour la Communication
Le gouvernement de Yaoundé est en difficulté par rapport à la lutte contre le covid-19. Plus moyen de commercer à l'extérieur à cause de la balance de paiement qui est très fortement déficitaire. Cette situation a été provoquée par le caractère extraverti de notre économie qui privilégie l'importation à la production interne qui aurait pu booster notre exportation. La balance de paiement a subi le dernier assaut dévastateur du fait des milliards sortis des caisses de l'État pour les chantiers de la CAN (plus de 2000 milliards) notamment pour l'achat a l'extérieur des préfabriqués.
Le Cameroun ne peut plus commercer avec l'extérieur du fait de la rareté de nos réserves en devises. Le covid-19 est venu mettre à nu cette vérité implacable. La loi des finances 2020 met à la disposition du gouvernement un certain nombre de leviers qu'il aurait pu actionner. Notamment les articles 51ème, 53ème et 58ème en cas de difficultés.
Article 51: le gouvernement est autorisé à souscrire à l'émission des titres publics notamment par l'obligation des bons de Trésor pour un montant n'excédant pas 320 milliards.
Article 53ème: le gouvernement est habilité à souscrire, dans les conditions garantissant notre souveraineté économique et politique, des emprunts concessionnels et des emprunts non concessionnels de montants respectifs n'excédant pas 300 milliards FCFA et 350 milliards FCFA.
Article 58ème: le Président de la République peut, par ordonnance, relever le niveau des plafonds contenus dans les articles 51ème et 53ème.
Ce qui revient à dire que le gouvernement est autorisé à contracter au total 320 + 300+350 = 970 milliards FCFA.
POURQUOI LE CAMEROUN NE LE. FAIT PAS?
La dette actuelle du Cameroun se chiffre à 38% du PIB, loin des 70% de plafond requis en zone CEMAC. Ce qui suppose que le Cameroun dispose d'une marge de 32% de dette supplémentaire par rapport au PIB.
Pourquoi Yaoundé ne va pasdue les marchés financiers contracter les emprunts concessionnels (taux d'intérêt normal de 5%) et les emprunts non concessionnels (taux pratiquement usuriers)? Eux qui sont si prompts à l'endettement effréné ces dernières années. Dans le cadre de l'article 51ème, Yaoundé a lancé un emprunt obligataire de 200 milliards FCFA pour booster les chantiers de la CAN. C'était avant le covid-19.. 76 milliards ont déjà été collectés. La question que l'on serait tenté de se poser est celle de savoir pourquoi Yaoundé n'utilise pas cette cagnotte pour procéder à l'importation des kits et autres appareils nécessaires dans la lutte contre le covid-19. La raison est simple à savoir que nos réserves en devises sont au creux au niveau de la Brac et dans le compte des opérations du Cameroun logé au niveau du Trésor français. Les éventuels fournisseurs du Cameroun sont de toute évidence réglés en dollars ou en euros et pas en CFA.
C'est ce qui justifie l'appui de l'équivalent de 135 milliards du FMI dans le cadre de la FCR via les droits de tirage spéciaux (DTS). Ce mécanisme permettra à la Beac de disposer des devises (€ et $). Cet argent qui est une DETTE que les camerounais vont rembourser ne profitera en rien aux entreprises camerounaises. Pas de plus-value. Les salaires des fonctionnaires sont gravement hypothéqués à court ou moyen terme. Les entreprises agonisent pour celles qui n'ont pas encore fermé. Les salariés du privé iront au chômage. C'est bientôt la catastrophe généralisée.
Ce qui précède aurait dû être là préoccupation majeure des médias au Cameroun. Ce qui n'est malheureusement pas la priorité.
On perd du temps à parler d'une affaire de dons d'au plus 500 millions FCFA de Survival-cameroon-survie-initiative qui ne représente même pas 20 FCFA par camerounais. Le Cameroun dispose de 25 millions d'habitants.
On perd également du temps a commenter sur 03 milliards versés par le PR dans le fonds de solidarité nationale ouvert. Ce qui ne représente que 120 FCFA par camerounais.
On devrait être aujourd'hui entrain de discuter sur les mesures à prendre pour lutter efficacement contre le covid-19. Le SDF a choisi d'accompagner le gouvernement dans cette lutte. Accompagner ne signifie aucunement être derrière le gouvernement. Il s'agit d'être dans une dynamique d'union sacrée. Ce qui ne signifie pas être d'accord sur tout. Entre l'impératif économique et l'impératif sanitaire, il faut bien en discuter. Le gouvernement a choisi le mi-chemin, si l'on s'en tient aux récentes mesures notamment celle de la réouverture des bars. Un débat devrait être engagé au niveau du Parlement.
Les Brasseries en général sont les plus gros contributeurs en terme de TVA qui a été budgétisé à hauteur de plus de 1200 milliards FCFA, pratiquement le 1/4 du budget national. Les recettes pétrolières (recettes d'exportation + recettes fiscales liées au pétrole) ont été budgétisées à environ 530 milliards en tenant compte du baril de pétrole à 57 dollars. Le baril est de moins de 30 dollars sur le marché, donc prévision difficile à atteindre. Les recettes attendues du cacao et du café ne peuvent pas être atteintes du fait notamment de la crise qui sévit depuis 2016 dans le NOSO (CDC etc sont au sol).
Il est constant qu'au vu des montants enregistrés jusqu'ici, le ping-pong entre deux extrémistes qui ne se parlent pas (du moins officiellement) et qui infestent le débat public participent de la pure diversion. 120 FCFA/camerounais pour le Fonds de solidarité nationale et à peine 20 FCFA/ par camerounais pour Survival-cameroon-survie-initiative. Ce qui fait un total de 140 FCFA par camerounais.
Il est temps que ça cesse et qu'enfin le véritable débat de fond soit ouvert.